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 [Clos] Gardienne

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Kahar-Srael - Dashnïr

Kahar-Srael - Dashnïr

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MessageSujet: [Clos] Gardienne   [Clos] Gardienne Icon_minitimeVen 29 Jan - 4:14

Citation :
Une des nombreuses histoires que peut raconter Kahar-Srael, que ce soit derrière un comptoir à servir ou accoudé à celui ci en sirotant un alcool léger. Il la raconte de temps en temps, lorsqu'on peut déchiffrer une humeur mélancolique sur son visage. Souvent d'un ton plat ou monotone, il parle avec une certaine nostalgie dans le regard.


Dans les plaines des fragments éloignés de Menoch, ce ne sont pas les petits villages qui manquent. Quand on s'asseoit sur une colline, on peut voir des patés de maisons, perdus entre des champs encore verts que le vent faisait danser. Mais même le temps ne préserve pas ce genre de paysage, que les attaques de monstres, le délabrement et les mauvais temps fesaient muer.

Certains villages étaient réputés pour leurs nombreuses fêtes, d'autres possédaient de grands temples, ou alors étaient simplement bien entretenues par leur seigneur. Mais celui où se déroule cette histoire n'avait rien de tout ça : Une quinzaine de faibles maisons en chaume, des petits champs et des chemins de terre qui permettaient difficilement d'être relié au reste du monde. Ce village était du genre de ceux qui n'étaient pas affectés par le temps, oublié et coupé de tout événement qui troublait l'extérieur.

Un temps de pluie, dans une de ces masures, une chatte venait de mourir après avoir eu une portée. Cinq chats de couleurs différentes. Tous étaient demandés et prisés pour qu'ils chassent, plus tard, les rats qui traînaient dans les granges. Dans le lot, il y avait une une femelle qui était évitée, car son pelage était d'un noir de jais, couleur du malheur et de la sorcellerie. Un à un, ces chatons disparaissaient, emportés par les fermiers chanceux, mais la dernière restait, et bientôt fut chassée de la maison, la famille vivant n'ayant pas eu assez de courage pour la noyer, après tout elle pouvait vivre dans les rues. Grâce à l'instinct et une certaine forme d'intelligence, elle sût se débrouiller malgré son jeune âge et son inexpérience la plus totale. Mais, répudiée des hommes comme des chats, trop noire et trop sauvage pour les côtoyer, elle était écrasée par une solitude très lourde. Si un animal pouvait avoir des sentiments, elle devait se sentir très malheureuse.

Au fur et à mesure qu'elle grandissait, elle devint la maîtresse du terrain. Terreur des rats et des chats. Son pelage soyeux, ses grands yeux verts et sa démarche souple montraient bientôt une chatte en très bonne santé et à la stature imposante. Quand elle vous regardait depuis les toits, vous ne pouviez que frissonner en espérant qu'elle ne vous attaque pas. Mais rien n'est éternel, son règne chuta lors d'un bond raté entre deux maisons. Elle espérait atterrir de l'autre côté, mais la mousse humide la fit glisser et c'est le sol rocheux qui l'accueillit. Les os rompus, elle souffrait en silence, paralysée par la douleur. Elle resta la nuit couchée, fiévreuse, sur le chemin, espérant mourir à chaque minute qui passait. Mais le destin ne lui accorda pas ceci, c'est un enfant moins superstitieux que les autres qui la trouva, brisée. Son coeur empli de pitié, il la ramena chez elle avec milles précautions. Fils d'éleveur, il réussi à prendre soin d'elle grâce à son expérience avec les animaux.

Les jours passaient et ses os se ressoudaient, ses yeux reprenaient leur éclat si profond et ses poils redevenaient brillants. Se laissant soigner par cet enfant envers qui elle ressentait une profonde reconnaissance, elle sentait sa vie revenir et la douleur s'estomper. Bientôt, elle put de nouveau marcher, mais elle perdit sa démarche gracieuse : elle boitait désormais, prix de son imprudence. Incapable de bien chasser, elle était désormais dépendante de ce garçon qui la nourrissait. Ne pouvant donc plus vadrouiller dans la campagne comme elle le faisait avant, elle restait sur le tapis de la chaumière, surveillant paisiblement les alentours de son regard pénétrant. Habituée par la présence de cette chatte si mystérieuse, la famille du garçon accepta qu'elle reste et elle obtint bientôt un nom : Gardienne.

Gardienne était peu à peu devenue très aimée du garçon. Quand il jouait avec elle, la chatte faisait patte de plume, elle se laissait porter par lui sans jamais se débattre et quand il lui parlait, elle clignait doucement des yeux comme si elle le comprenait. Son pelage noir faisait détourner les gens mal intentionnés et son agressivité faisait fuir les animaux indésirables. Gardienne ne tolérait que le petit humain et ses parents, qu'elle protégeait avec une affection touchante. Quand ils allaient à la ferme, elle était derrière eux, boitant pour les suivre.

Le temps ne rend jamais les choses immuables. Le garçon devenait adolescent et il devenait pétri de rêves et d'espoirs quant à son futur. Mais son futur n'était pas dans ce village très morne, il avait envie de partir. Mais il ne pouvait pas emporter la chatte dans son voyage et il en était très triste. Il hésitait beaucoup quant au cheminement à suivre et quand il en parlait à Gardienne, elle lui répondait par un regard presque implorant.
Il resta, de longs moments en compagnie de son amie. Et cette dernière le suivait toujours. Et le soir elle restait sur le tapis pour surveiller son petit territoire. Après quelques années, tiraillée par la douleur à sa patte boitante et épuisée par l'âge qui devenait pesant, elle n'était plus capable de suivre l'homme et se contentait de rester devant la porte, attendant son retour.

Un soir, elle n'a plus revu son ami. Il était finalement parti ailleurs, la laissant sur le tapis, ne s'étant pas résolu à lui dire adieu. Mais elle gardait courage, en se disant qu'il reviendrait le lendemain soir. Mais il n'était toujours pas revenu et elle s'est mise à miauler en espérant attirer son attention s'il était dans les parages. Bientôt insupportés par ses miaulements, les parents essayèrent de la chasser sans succès, et n'arrivaient pas à l'attraper, elle restait rapide et évasive. Ils sont donc partis dans le mois après avoir eu des nouvelles de leur fils bienheureux pour, eux aussi, essayer de trouver un jour meilleur dans un autre village plus joyeux. Gardienne s'est donc retrouvée seule, affreusement seule.

Malgré ses handicaps, elle réussissait à attraper les bestioles les moins malignes et à éviter tous les dangers qui commençaient à devenir préoccupants pour une vieille chatte infirme. Mais elle semblait avoir perdu sa joie de vivre et commençait à maigrir de jour en jour. Son poil devenait enchevêtré et rugueux de saleté, sa démarche de moins en moins assurée et ses moustaches tombantes, défaitistes. Seuls ses yeux conservaient un éclat farouche, une lueur d'espoir intense y brillait toujours, l'espoir tenace qu'un jour la seule personne qui l'a acceptée reviendrait la voir pour la reprendre dans ses bras.

Le temps s'écoulait, elle restait toujours sur le tapis d'une maison qui se délabrait de jours en jours. Le village se vidait petit à petit, les habitants voyageant pour fuir la monotonie de la vie. Bientôt, l'animal devint l'unique être vivant dans cet endroit. Le silence était seulement rompu par les miaulements désespérés de Gardienne, qui appelait de tout son corps le garçon qu'elle avait connue. Viellissant, elle commença à ne plus quitter le tapis sec et rigide. Elle buvait l'eau de la pluie qui tombait occasionnellement et mangeait le cadavre devenant de plus en plus corrompu d'un dernier lapin trop vieux pour fuir qu'elle avait réussi à attraper.

Le dernier jour, elle regardait le crépuscule à l'horizon. Elle se remémorait toute sa vie : sa naissance, son rejet, la rue, son règne, sa blessure, le garçon, l'adolescent, l'homme, sa solitude, solitude, solitude. La chatte avait de plus en plus de mal à respirer, ses poumons écrasés par son faible poids, devenant trop faible pour se soulever. Elle se résignait enfin à accepter le fait qu'elle allait mourir sans le revoir. Elle avait dédié toute son existence à l'attente de cette personne en vain, elle voulait tellement attendre encore un peu, attendre le garçon qui voudrait jouer une dernière fois avec elle, la caresser et rejoindre paisiblement le ciel sur ses genoux. Elle voulait encore un peu de cette tendresse dont elle a pu profiter un moment durant cette vie de solitude. Sa vie la quitta peu à peu avec cette unique pensée, contemplant le soleil disparaissant derrière la colline. Elle ne ressentait pas grand chose, sinon une sombre acceptation de son sort.

C'est alors qu'elle fut soulevée du sol par deux mains fermes. Elle se laissa faire, trop faible pour défendre son territoire. Mais un doute fou, fou d'espoir, lui parvint et en relevant avec difficulté la tête elle put voir le visage d'un homme qu'elle reconnu facilement, qui lui souriait tristement.
La chatte sentit une main tendre s'appuyer sur sa tête, la caressant avec une douceur indescriptible. Tout de suite, la chaleur s'empara d'elle, de courte durée.

Gardienne poussa un unique miaulement, agonisant mais heureux, pour le remercier. Un remerciement ultime qu'elle aurait aimé être d'une intensité plus forte. Mais cela la vida de ses dernières forces et elle laissa expirer son dernier souffle, couchée sur les genoux du seul être qui l'avait aimée dans ce monde.
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